Le secteur du bâtiment est responsable chaque année d'un nombre important d'accident de chantier et de BTP. Ces accidents de travails ont un coup pour la santé mais aussi pour les employeurs. Les chiffres évoquent une moyenne de 56 accidents pour 1 000 salariés. Après les accidents de transports professionnels les accidents de BTP sont la deuxième cause en France des accident de travail. Un nombre important des accidents trouvent encore leur origine dans des manquements graves aux obligations de sécurité et de protection. A lui seul, le secteur du BTP est responsable de 14% des accidents de travail.
Les chutes de hauteurs, les accidents de manutention, de machines outils, électriques, d'émanations toxiques, de véhicules de chantiers, de travaux publics ou de levages (grues) sont surreprésentés dans les accidents de chantiers. Les risques professionnels divergent évidement en fonction du secteur d'activité. Les accidents les plus graves sont surreprésentés dans les domaines tels que : le travail sur toitures, sur échafaudages, sur échelles, sur planchers, murs, charpentes, coffrage, grues et nacelles...
Le droit du travail est strict à l'égard du non respect des obligations de sécurité et de la protection des salariés.
Aux termes de l'article L. 4121-1 du Code du travail l'employeur est tenu de prendre toute les mesures pour assurer la sécurité et la protection de la santé physique et psychique de ses salariés. La Cour de cassation considère que cette obligation est une obligation de résultat. En conséquence, l'employeur ne doit pas seulement limiter le risque mais il se doit de l'empêcher. Sur ce fondement, la simple réalisation de l'accident suggère la possibilité de mettre en cause la responsabilité de l'employeur.
Si les mesures prises par l'employeur pour empêcher l'accident sont insuffisantes et que la mise en danger du salarié ou le défaut de sécurité est à l'origine même partiel de l'accident, l'employeur s'expose à une responsabilité de plein droit. Les causes d'exonérations se limitent aux seuls cas de forces majeurs ou lorsque le salarié a concouru lui même à la réalisation de son dommage.
Concrètement l'employeur se doit de respecter des principes fondamentaux de sécurités et mettre en oeuvre une politique générale de prévention des risques, énumérés à l'article L. 4121-2 du Code du travail :
Lorsque l'accident trouve son origine dans un manquement au devoir élémentaires de sécurité par l'employeur à l'égard de ses salariés aboutissant à la reconnaissance d'une faute inexcusable, le salarié pourra bénéficier d'une majoration de la rente ou du capital versés par la CPAM.
Concrètement, lorsque le salarié sera consolidé il passera devant le médecin conseil de la sécurité sociale. Ce dernier établira son taux d'incapacité sur la base du barème indicatif des accidents de travail de la sécurité sociale. Si le salarié obtient un taux d'incapacité ≥ à 10% il bénéficiera d'une rente trimestrielle et si le taux est < à 10% il ne percevra qu'un capital. En revanche, si la faute inexcusable de l'employeur est reconnue et que le salarié est éligible à la rente, celle-ci pourra être majorée pour représentée jusqu'à 30% du salaire de référence du salarié. Si le salarié est éligible au versement d'un capital la faute inexcusable lui permettra le doublement de celle-ci.
Toutefois, cette réparation versée par la solidarité nationale n'est que forfaitaire puisqu'elle ne couvre pas l'intégralité du préjudice du salarié victime d'une faute inexcusable. Pour cette raison, l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale prévoit lorsque l'accident est la conséquence d'une faute inexcusable de l'employeur à son devoir de sécurité, la victime ou ses ayants droits ont droit à une indemnisation complémentaire. En d'autres mots, la faute inexcusable de l'employeur fait basculer le salarié dans un régime proche de la responsabilité civile ce qui lui permet de demander l'indemnisation de presque tous les postes de préjudices. L'accident de trajet (accident entre le lieu de travail et le domicile) n'est en revanche pas concerné par ce régime de réparation complémentaire.
Quels sont les préjudices complémentaires dont le salarié victime d'une faute inexcusable peut réclamer indemnisation ?
Aux postes de préjudice prévus par la loi sont venus se rajouter des postes des préjudices reconnus par la jurisprudence. Actuellement les postes suivants peuvent l'objet d'une indemnisation si ces derniers sont reconnus au cours d'un expertise médicale :
En revanche, les postes de préjudices suivants ne sont pas indemnisables à l'heure actuelle :
Depuis 2018 le Tribunal des affaires de sécurité sociale a été remplacé par le pôle social du Tribunal judiciaire qui est désormais la juridiction compétente pour connaitre des litiges relatifs à la faute inexcusable de l'employeur.
La victime et les ayants droits peuvent être à l'initiative de procédure en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur selon l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale. Cette procédure peut aussi être initiée par la CPAm elle même selon l'article 452-4 du même code.
Traditionnellement et habituellement il était nécessaire pour la victime ou les ayants droits de passer d'abord par l'étape de la conciliation avec la Caisse d'assurance maladie. Depuis un arrêt de la Cou de Cassation de 2019 (Cass. 2e Civ, 14 mars 2019, n° 18-12.620) il n'est plus obligatoire de passer par la conciliation avant de saisir le pôle social du Tribunal Judiciaire.
Combien de temps dispose la victime ou les ayants droits pour saisir le Tribunal d'une faute inexcusable de l'employeur ?
La procédure de faute inexcusable de l'employeur doit absolument être initiée dans les 2 ans à compter :
L'action pénale interrompt toutefois la prescription de 2 ans.
La procédure de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur vise à obtenir la majoration de la rente ou du capital de la CPAM. En outre, il permet d'obtenir la réparation des postes de préjudices complémentaires reconnus par le Code de la sécurité sociale et par la jurisprudence. Toutefois, dans cette perspective le recours à un avocat en droit du travail et en dommage corporel semble indispensable. La procédure de quantification des postes de préjudices complémentaires indemnisables devant un médecin expert rend également le recours à un médecin conseil recommandé.
Depuis janvier 2019, le procédure de saisine du Tribunal judiciaire réunis en pôle social se fait sur la base de l'article R 141-10-1 du Code de sécurité Sociale :
- Le tribunal est saisi par requête remise ou adressé au greffe par lettre recommandée avec avis de réception. Elle doit contenir "un exposé sommaire des motifs de la demande accompagnée
1° des pièces que le demandeur souhaite invoquer à l'appui de ses prétentions. ces pièces sont énumérées sur un bordereau qui lui annexé.
2° D'une copie de la décision contestée ou en cas de décision implicite, de la copie de la décision initiale de l'autorité administrative aide l'organisme de sécurité sociale ainsi que de la copie de son recours préalable "
La victime d'un accident de travail ou les ayants droits sont susceptibles de faire reconnaitre la faute inexcusable de l'employeur si ce dernier :
Le lien de causalité entre le manquement de l'employeur à son devoir de sécurité et l'accident de travail doit être établit pour que la faute inexcusable soit retenue. La cause nécessaire sans être pour autant directe et déterminante est parfois jugée suffisante en jurisprudence.
La charge de la preuve des manquements aux devoirs de sécurité de l'employeur relève en principe de la victime ou des ayants droits.